mercredi 31 décembre 2008

Au revoir 2008

Aux éventuelles lectrices, aux éventuels lecteurs qui passeraient encore sur ce blog (forme archaïque d'internet 2.0 utilisée au début des Années 2000 par de nombreux humains pour compenser leur solitude et remplacer les journaux intimes de façon avantageusement exhibitionniste), je souhaite bon vent.
Que 2009 soit pour toutes et tous une belle année.
Paix et santé, joie, bonheur, prospérité et tout le tremblement !
Pour ma part, je me souhaite une meilleure santé mentale, essayer d'oublier 2008, année qui vit le meilleur pour moi (la rencontre de Valérie, ma douce et tendre) comme le pire (la mort de ma mère).
Qu'écrire d'autre ? Plus rien... Le silence est d'or !
Peut-être me recroiserez-vous sur internet, par le biais de Copains d'Avant ou de Face Book, ou par le moyen de mails. Sinon, la vraie vie, c'est pas mal aussi, même si c'est plus difficile que la vie derrière un écran, bien à l'abri de son clavier et en compagnie de sa petite souris...
PACE E SALUTE !!

dimanche 14 décembre 2008

Petits éléments de biographie de la vie de ma mère...

Tout d'abord, merci à toutes et tous pour vos messages de soutien, de réconfort, de tristesse... J'ai essayé de répondre à tout le monde, individuellement, comme il se doit. Je présente d'avance mes excuses si j'ai oublié quelqu'un.
Un ami me demandait l'autre jour s'il pouvait quelque chose pour moi... Je lui ai dit : ne changez rien... Continuons à parler ciné, musique, politique, et tout et n'importe quoi... Ma mère n'aurait pas aimé qu'on se lamente trop longtemps, elle qui n'a pas souvent manqué au boulot. Pour ma part, en ce dimanche où la neige ne cesse de tomber, j'ai voulu écrire quelques mots pour essayer de parler un peu d'elle... C'est vrai, je vous ai demandé d'avoir une pensée pour elle. Pour celles et ceux qui la connaissaient, c'est chose assez aisée. Pour les autres... Voici ce petit texte biographique...
Ma mère, Anne-Marie Pérès, née Salens, fille de Jean-Marie Salens et Anne Monin (d'où son prénom Anne + Marie), est justement née à Rabat (Maroc, alors protectorat français) dans la nuit du 9 au 10 avril 1944. Mon grand-père et ma grand-mère avaient fui la France vichyste et mon grand-père fit partie des troupes qui remontèrent l'Italie et affrontèrent les Allemands à Monte Cassino.
Mon grand-père Salens était d'origine nordiste, flamande francophone. Il a eu trois frères et soeurs, Michel (devenu moine missionnaire notamment en Chine et à Madagascar), Anna (soeur de la Sagesse) et Tante Ninette (toujours vivante mais je ne me souviens pas de son prénom, la seule à avoir gardé l'accent ch'ti). Ma grand-mère Anne, pur jus lyonnais (avec une pincée de sang anglais voire tchèque dans les lointaines générations), avait une soeur, Madeleine, toujours vivante, devenue la marraine de ma mère. Ma mère a eu trois soeurs, Monique, Bernadette, Geneviève. Et aussi deux frères, morts en bas-âge (c'était courant en ce temps là).
Mes grands-parents maternels étaient profs, coopérants. Ma mère a passé son enfance entre Algérie, Indochine, Antilles et sautant d'un paquebot à l'autre, puis la région lyonnaise et enfin Menton où mes grands-parents avaient choisi de passer leur retraite. Ma mère était en classe préparatoire littéraire au lycée Masséna de Nice, où elle a rencontré mon père (pur Niçois avec un père corse et un grand-père maternel catalan) qui a prétendu être meilleur qu'elle en grec ancien pour lui donner des conseils... Les vieilles ficelles marchent toujours !!
Premier voyage de mes parents, pas même fiancés... La Corse, plus particulièrement le Cap, plus particulièrement Roglianu et le couvent franciscain (le voyage était organisé par la paroisse). Mes parents se sont fiancés au couvent Saint-François de Nice [Saint François a toujours inspiré mes parents et est à l'origine de mon prénom, additionné de Jean pour faire plus long "prénom à trois syllabes pour nom à deux syllabes"] puis mariés à Notre-Dame de Laghet. Le curé qui les a mariés, l'abbé Lanzat, décédé récemment, baptisa plus tard ma soeur et moi-même.
Fin des études supérieures de mes parents à Paris. Je suis pour ma part né à La Hay les Roses un certain 22 mars 1970, deux ans jour pour jour après le début des événements de Mai 1968, dont mes parents gardèrent toute leur vie la mémoire... Ah... les charges de CRS et les infos suivies sur RTL et Europe 1...
Nous avons débarqué par le hasard des mutations à Moulins-sur-Allier en 1971. Les premières années, mes parents souhaitaient partir, se rapprocher du Sud, voire aller aux Antilles. Finalement, notamment après la naissance de ma soeur Nathalie le 23 mars 1977 (on a sept ans, une journée, quatre heures et trente minutes d'écart), mes parents sont restés en terre bourbonnaise. Ils appréciaient la région, sa tranquillité, la proximité de Paris qu'ils ont toujours aimé...
L'été 1980, une grande date dans ma vie, je suis parti avec mes parents trois semaines en Grèce, naissance de ma passion pour l'archéologie, coup de foudre pour un pays et une langue et une culture...
Lister toutes les régions visitées grâce à mes parents serait fastidieux... En tout cas, ils ont communiqué à ma soeur et moi-même le virus de la curiosité atistique, culturelle, historique (et égalemengt gastronomique !)... Allez, je cite quand même... au hasard... le Périgord, l'Alsace, la Corse (of course !!), la Bretagne, la Savoie...
Et puis, bien sûr, tous nos étés à L'Escarène, le village de mon père, dans l'arrière-pays niçois...
Plus tard, mes parents ont fait quelques pays d'Europe et de Méditerranée... Italie, Espagne, Irlande, Maroc, Tunisie, Sicile... Et les escales en Corse pour me voir et en Allemagne pour voir ma soeur...
La maladie d'Alzheimer a été déclarée officiellement chez ma mère début décembre 2001. La suite, je veux pas en parler. J'en ai suffisamment parlé sur ce blog.
Je voulais juste vous parler un petit peu de ma mère, "avant", ma mère qui repose désormais au cimetière de L'Escarène.
Elle était professeur de Lettres classiques au Lycée de Jeunes Filles de Moulins, devenu Collège Anne de Beaujeu à la fin des Années 1980. Je l'ai eue comme prof de français en 6ème puis comme prof de grec en 4ème/3ème... Elle était rigoureuse, elle m'a laissé le goût du travail bien fait... Elle m'a fait découvrir, avec mon père, la lecture. Elle m'a communiqué sa passion du théâtre et de la langue française, qu'elle et mon père ont toujours partagé. Elle aimait aussi le cinéma, notamment les comédies ou les films sentimentaux... J'ai le souvenir de "Simples Secrets" avec Di Caprio, Meryl Streep, Diane Keaton, un film évoquant une maladie longue et douloureuse... un film prémonitoire ? Elle adorait la musique, elle avait des goûts très éclectiques, de La Compagnie Créole à "Carmen" en passant par les chansons irlandaises ou corses...
Il y aurait tant et tant à écrire...
Elle est partie.
J'espère qu'elle repose en paix, près du Père, pas trop loin de Molière et de La Fontaine.

samedi 13 décembre 2008

Triste nouvelle

Vendredi 5 décembre, à 8h15, ma mère, Anne-Marie Pérès, est décédée, à l'hôpital de Moulins. Elle avait 64 ans. Une messe a été dite mardi 9 décembre au matin en l'église Saint-Pierre de Moulins, sa paroisse depuis tant d'années, messe célébrée par le Père Cabaud.
Ma mère a été enterrée à L'Escarène (Alpes-Maritimes, arrière-pays niçois) jeudi 11 décembre après-midi.

Merci d'avoir une pensée pour elle.

jeudi 4 décembre 2008

Nous vivons une époque moderne !

Tu t'aperçois que tu vis en 2008 quand :

1. Par accident, tu tapes ton mot de passe sur le micro-onde.
2. Ça fait des années que t'as pas joué au solitaire avec des vraies cartes.
3. T'as une liste de 15 numéros de téléphone pour joindre une famille composée de 3 personnes.
4. T'envoies un mail à ton collègue de bureau juste à côté du tien.
5. T'as perdu le contact avec tes amis ou ta famille, parce qu'ils n'ont pas d'adresse e-mail.
6. T'arrives chez toi après une longue journée de travail et tu réponds au téléphone comme si tu étais encore au bureau.
7. Tu fais le zéro sur ton téléphone du domicile pour prendre la ligne.
8. T'es à ton poste de travail depuis 4 ans mais t'as travaillé pour trois entreprises différentes.
10. Toutes les pubs télé ont une adresse Web en bas de l'écran.
11. Tu paniques si tu sors de chez toi sans portable et tu fais demi-tour pour le prendre.
12. Tu te lèves le matin et la première chose que tu fais c'est de te connecter à Internet avant même de prendre ton café.
13. Tu inclines ta tête sur le côté pour sourire.
14. T'es en train de lire ce texte et tu acquiesces et souris. 15. Encore pire, tu sais déjà à qui tu vas renvoyer ce message.
16. T'es trop occupé pour t'apercevoir qu'il n'y a pas de numéro 9 dans cette liste.
17. A l'instant, tu parcours le message pour vérifier qu'il n'y avait pas de numéro 9 dans la liste.
CONSEIL : Lorsque ton travail t'ennuie, que tu es au bord de la dépression, que vraiment plus rien ne va comme tu le voudrais au travail... Alors fais ceci : En sortant du travail arrête-toi à la pharmacie, achète un thermomètre rectal Johnson & Johnson [seulement cette marque là]. Ouvre la boîte du thermomètre rectal et lis les instructions. Tu trouveras cette phrase quelque part : Chaque thermomètre rectal Johnson & Johnson a été testé personnellement à notre usine. Alors maintenant ferme les yeux et répète 5 fois à voix haute : "Je suis heureux [se] de ne pas travailler au contrôle de la qualité chez Johnson & Johnson."
ET MAINTENANT TU RIGOLES.
Allez, renvoie ceci à tes amis... T'en meurs d'envie !!!Et rappelle-toi toujours qu'il y a des jobs plus merdiques que le tien !...
[Merci à Valérie pour ce "joke internet" !]

mardi 2 décembre 2008

Le temps de l'attente

Une étrange impression. Depuis plusieurs mois, les médecins nous disent, à mon père, à ma soeur et à moi-même (enfin, moi, ils me disent rien, c'est mon père et ma soeur qui me donnent les infos), que l'état de ma mère va s'aggraver... à tel point que j'en viens à me dire quel sens on doit donner au verbe "s'aggraver"... Et puis, depuis un mois et demi, "on" nous explique qu'il lui reste "quelques jours, tout au plus quelques semaines, à vivre". Alors, forcément, chaque coup de fil me fait craindre le pire. Remarquez, comme je reçois très peu de coups de fil (j'en donne aussi très peu : je suis pas "fana" du téléphone), y a pas trop de risques... N'empêche, encore hier, appel de mon père... J'ai senti le sol se dérober sous mes pieds. "Fausse alerte". L'état de ma mère peut-il encore s'aggraver ? Oui. Je le découvre chaque semaine. Je ne pensais pas que j'en viendrais à regretter l'état de ma mère il y a un mois quand elle arrivait à me sourire, l'état de ma mère il y a deux mois quand elle criait parce qu'elle n'arrivait plus à articuler, l'état de ma mère il y a trois mois quand elle pleurait lorsque je quittais sa chambre d'hôpital. Peut-être que dans un mois je regretterai l'état actuel de ma mère...
La maladie d'Alzheimer, la vraie, pas le "yoyotage" des personnes âgées voire très âgées (que des médecins généralistes ignorants appellent Alzheimer parce qu'ils ont entendu le mot à la télé), a été pronostiquée chez ma mère fin novembre 2001, alors qu'elle avait 57 ans et qu'elle était encore bien sûr en activité. Depuis, c'est une longue descente en enfer... Sept ans en enfer... Et c'est peut-être pas fini et ça peut encore durer. Des semaines, des mois, peut-être des années. Il y a eu une période où l'état de ma mère s'était quelque peu "stabilisé", après la dépression consécutive à l'annonce de la maladie, entre 2002 et 2003, à tel point que les gens qui la voyaient ne croyaient pas qu'elle était malade. Puis ce fut une descente inexorable, qui s'est progressivement accélérée à partir de l'hiver 2004/2005, à mon retour de Corse, et surtout de l'hiver 2005/2006, quand elle a commencé à faire des chutes... Les chutes... Un véritable cauchemar au quotidien.
Sept ans en enfer. Voilà ce que fut la vie de ma mère ces sept dernières années. Avec la lucidité (parce que c'est pas une maladie où "on est dans son monde" comme disent la plupart des personnes qui croient qu'Alzheimer serait une espèce de maladie des étourdis), avec la terreur, oui la terreur, pour compagne, parce que dès le départ elle savait ce qui l'attendrait : ce serait long, ce serait dur, ce serait humiliant. Elle le savait et les médecins n'ont jamais pris de gants avec elle, certains lui expliquant froidement qu'elle finirait comme un "légume".
Et moi ? Bof... Valérie m'a trouvé ces derniers temps plus solide (mon séjour à l'hôpital et mon suivi médical semblent porter leurs fruits) mais plus triste. Ma cousine Françoise m'a trouvé particulièrement nostalgique, porté sur le passé. Je pense aussi que j'aurais un peu tendance à virer à l'aigre par moments... Une certaine désillusion face à la médecine, aux médecins, à l'euthanasie passive qui ne dit pas son nom et qui sévit dans les hôpitaux... c'est l'impression de mon père et je finis par me dire qu'il n'a pas tout à fait tort quand j'ai vu depuis trois mois les aide-soignants renoncer à faire manger ma mère puis ensuite expliquer que son état était désormais irréversible... Forcément, si on nourrit pas quelqu'un pendant des mois, il finit par aller pas bien du tout du tout...
Comment réagir ? La colère ? Ouaip... J'ai déjà donné. Je connais la fameuse théorie des "cinq phases" qui accompagnent l'annonce d'une mort prochaine ou d'une maladie incurable : refus, colère, marchandage, dépression, acceptation... Je n'ai pas de colère, peut-être en ai-je eu contre mon père, contre le monde médical, contre moi-même surtout. Mais c'est bien inutile. C'est de l'énergie en pure perte... Certes, c'est une maladie particulièrement ingrate et humiliante et dégradante. Mais, à différents échelons, toutes les maladies sont abominables. Je n'ai connu le monde de la maladie et de la mort qu'à la trentaine bien tassée... J'en ai été épargné très longtemps... Je ne peux même pas imaginer le quotidien des personnes vivant avec un fils, un frère, un époux, un père, handicapé, atteint d'une maladie chronique, alité, nécessitant des soins constants, des examens fréquents.
Je ne vais pas dire "c'est injuste"... Injuste pourquoi ? Injuste pour qui ? Quand la maladie touchait des gens que je ne connaissais pas, je ne me posais pas la question de l'injustice... Je vivais ma vie paisiblement. La mort est le terme naturel de la vie et elle est souvent précédée de la maladie. C'est ainsi. Qu'on soit croyant ou athée, c'est un fait acquis. J'aime la boutade : "la vie est une maladie mortelle sexuellement transmissible". Simplement, si je ne dis pas que la souffrance est un scandale, comme a pu l'écrire Camus, je ne partage absolument pas le point de vue de celles et ceux qui voient dans la souffrance un moyen merveilleux de se transcender. Je trouve même cette idée, véhiculée parfois par des religions maladroites, assez révoltante pour ne pas dire lamentable. La souffrance est là, elle ne transcende personne.
Je ne vais pas dire "je me sens tellement inutile"... Je l'ai longtemps dit, mais c'est faux. D'abord, y compris dans les derniers moments, notre présence est utile. Même dans des cas de personnes en coma profond, on conseille aux visiteurs de leur parler parce qu'elles ne seraient pas insensibles au son de la voix... Et puis, qu'est-ce que ça veut dire, être inutile ? C'est croire qu'on pourrait être utile, tout puissant, triompher de sa maladie voire de celle de l'autre ? Certes, mon pseudo sur internet est Superdoc, clin d'oeil à un logiciel documentaire, mais certainement pas à un super-médecin qui aurait le pouvoir de guérir les gens.
La colère... le marchandage... Nous connaissons tous cette période où nous pensons que, bon, ça ne va pas aller mieux, mais ça ne va pas empirer. Comme je l'ai écrit plus haut, il y a eu une période où ma mère semblait sinon aller mieux en tout cas vivre malgré tout pas trop mal avec la maladie. C'était le temps où je me disais que je n'aurais pas à rentrer sur le Continent, mes parents pouvaient venir me voir régulièrement en Corse, depuis leur base sur la Côte d'Azur où mon père a la maison familiale et où la famille de ma mère vit. En plus, c'était pour moi l'opportunité de renouer avec cette famille que j'avais un peu perdu de vue... Le marchandage ne dure qu'un temps.
La dépression ? J'ai connu, je connais encore. La dépression, cette fièvre de l'âme comme j'aime à le dire. La dépression qui peut être une réaction saine à trop de pression, comme un coup d'arrêt à une fuite en avant. La fuite en avant, dans le travail, dans les distractions, dans l'étourderie de l'alcool ou des comportements à risque...
Quand une situation devient intolérable on finit parfois par la nier car sinon on ne trouve plus la force de vivre. La tentation est grande de se réfugier dans le passé. Mon goût prononcé pour la nostalgie m'y pousserait. Après tout, comme dit le chanteur, "c'était mieux avant". On peut passer des heures, des jours, des semaines, enfermé chez soi, à repenser aux bons moments de jadis qu'on aura embellis, travestis, détournés au gré d'une humeur chagrine... Je connais, j'ai déjà donné. Je ne suis plus porté sur ce type de nostalgie qui m'a conduit aux portes du néant intérieur. Par contre, quand le passé, les souvenirs de l'être cher, vous tombent dessus... C'est pas toujours facile de lutter.
La tentation de l'isolement est puissante. En même temps, on n'a pas envie forcément de parler, de raconter ses états d'âme. Et d'abord, à qui raconter ? et quoi raconter ? Chacun(e) a ses soucis et sa vie. Et puis, une personne déprimée n'est pas un compagnon de table ou de soirée bien agréable. Pour ma part, j'arrive plus facilement à m'exprimer par écrit qu'à l'oral. En tout cas, j'arrive à peu près à ordonner ces pensées qui se bousculent. En outre, j'ai pas forcément non plus envie de parler de moi et de ma mère. Depuis sept ans, la première ou la deuxième phrase qu'on me pose systématiquement ou presque est "comment va ta maman ?" Quand je sors, je veux un peu oublier tout ça. Simplement, en ce moment, j'ai pas envie de sortir, de me distraire, de bavarder autour d'un bon repas. Parce que c'est pas le moment. Il y a un temps pour tout.
L'acceptation, phase ultime. Accepter la maladie. A-t-on le choix ? Pas vraiment. Quoique... Comme je l'ai mis plus haut et expérimenté moi-même, il est toujours possible de se réfugier dans le déni (rester dans la première "phase" ou y replonger), dans l'illusion d'un monde où la maladie n'existe pas, en vivant dans le passé et/ou dans l'ivresse (médicamenteuse, alcoolique ou autre fuite en avant). On peut aussi être en colère, contre Dieu (si l'on y croit), contre l'institution médicale, contre la famille ou les amis, contre soi-même. On peut rester dans la dépression. En fait, plein de solutions s'offrent à nous si nous ne voulons pas voir la vérité en face.
Accepter la vérité de notre condition. Accepter qu'il y a des choses qui dépendent de nous et d'autres qui n'en dépendent pas. Ce qui dépend de nous, nous pouvons le modifier ou en tout cas essayer. Ce qui ne dépend pas de nous, nous devons l'accepter, accepter notre impuissance qui n'en est pas une puisque ce n'est pas de notre ressort. C'est plus facile à dire qu'à faire. Certes. Mais c'est probablement la seule clé possible pour pleinement vivre. C'est une idée défendue par les philosophes stoïciens, notamment Epictète (que j'ai connu grâce à Fred de Ceyrat) ou Marc-Aurèle mais aussi Sénèque (qui fut exilé à Luri !) qui avait expliqué à une femme qui venait de perdre son jeune fils dans une terrible maladie que, bien sûr, c'était terrible mais que tant que son fils n'avait pas été touché elle ne s'était pas demandé plus que ça si c'était injuste ou non que des jeunes meurent "avant l'âge".
Accepter que nous ne pouvons pas tout. Accepter notre état de mortels, de malades (ou de bien-portants !). Ce n'est pas du fatalisme, bien au contraire. De même que d'être lucide sur l'état du monde et des hommes n'est ni du cynisme ni du pessimisme mais du réalisme. Accepter notre condition pour pouvoir nous en affranchir... Pourquoi pas ?
Etre et rester lucides. Ne pas céder à la tentation de la fuite en avant, dans le travail, dans les divertissements, dans l'ivresse, dans le cocon familial protecteur...
Etre lucides mais aussi profiter de chaque instant au présent. Une idée défendue par Epicure et ses disciples, qui ne signifie nullement (bien au contraire !) plonger dans les plaisirs les plus factices, mais savoir profiter de soi, des autres, des instants simples... "Carpe Diem !"... "Seize the Day !"
Les idées des philosophes grecs sont toujours d'actualité, de même que certains préceptes enseignés par les religions... Pour ma part, je ne citerai que la religion que je connais sinon la mieux en tout cas le moins mal, à savoir le Christianisme... Puisqu'on est dans le Temps de l'Avent... C'est le temps où l'on incite les croyants à "veiller et prier" car "nous ne savons ni le jour ni l'heure"...
Le temps de l'attente. Le temps de l'incertitude. Le temps des doutes. Le temps des nuits blanches, des souvenirs qui se bousculent, des petits matins d'angoisse...