Les gens heureux n'ont pas d'histoire... J'adore cette affirmation... Comme cette autre : pour vivre heureux, vivons cachés. Ou encore : cultivons notre jardin.
Revenons à la première phrase... Les gens heureux n'ont pas d'histoire. C'est assez vrai, d'une certaine façon. Quand on va bien, on n'a pas trop à en causer. On est bien avec les personnes qui nous rendent heureux (notre amoureuse ou notre amoureux, nos bons copains, notre famille voire tout simplement les collègues ou les voisins) et on voit pas les autres. Et si on les croise, quand ils nous demandent "Alors, ça va ?", on répond : "Oui, ça va, tout va bien". Et la conversation ne peut que s'arrêter là. Quand ça va, c'est pas évident pour engager la conversation. Faîtes l'essai... Vous constaterez l'évidence. Alors que si vous dîtes "ça va pas trop mal", ou "ça va à peu près", vous commencez déjà à venir intéressant et la conversation s'emballe. Le top c'est de répondre "non, en ce moment, ça va pas trop"... Et vous allez tout de suite susciter l'intérêt de votre interlocuteur... Voire son embarras... Qu'est-ce qui m'a pris de lui poser cette question ? Je vais en avoir pour trois heures à écouter ses confessions et j'ai un rendez-vous dans dix minutes... Oups ! Si, quand quelqu'un vous demande "alors, quoi de neuf ?", vous répondez "oh, pas grand-chose, tout va bien"... La personne sera déçue et s'exclamera : "c'est tout ce que tu racontes ?" Bref, le bonheur est ennuyeux et inintéressant. Aurait-on inventé le malheur pour meubler la conversation ? Qui sait ! Si j'écris cette petite chronique bien inutile c'est parce que je constate comme beaucoup que quand tout va bien on ne prend pas forcément le temps de l'écrire... On n'a pas grand-chose à raconter. (D'ailleurs, des poèmes, des romans, des films, sur le bonheur, y en a pas des masses... Pour qu'une histoire soit bonne il faut du malheur... On parle de l'intérêt dramatique d'une oeuvre... C'est pas pour rien ! Faut du drame !!! De même les actualités heureuses n'intéressent pas grand-monde et les journaux ont besoin de drames divers et variés voire avariés pour maintenir l'intérêt du lecteur ou du téléspectateur !! Le bonheur, c'est la mort de l'info !!) Quand ça va pas on a toujours des tas de choses à dire... Remarquez, c'est pas forcément vrai... Quand on va pas bien, on veut pas toujours en causer et on s'enferme dans sa coquille... Conclusion : ma théorie s'effondre ! N'empêche, quand tout va bien, on n'a pas forcément grand-chose à dire et on se retrouve avec un blog qu'on ne tient plus à jour. Et, comme a contrario si on ne donne pas de nouvelles c'est qu'en général on ne va pas bien je me dois d'écrire une chronique pour dire que... je n'ai rien à dire puisque tout va bien... Ah, bien sûr, l'état de ma mère s'aggrave avec une régularité toute mathématique qui me fait profiter de chaque moment en sa compagnie... Bien sûr, je suis seul depuis si longtemps que je ne sais plus comment ça fait la vie à deux... Mais les bons moments sont si nombreux depuis quelques mois que je me demande presque comment j'ai pu me passer de sorties pendant tant d'années... Et la vie au collège se passe tellement bien, que ce soit avec les élèves ou les collègues... Le monde politique est chaque jour plus passionnant tellement il en est ubuesque... Bref, tout va pour le mieux même si ça pourrait aller encore mieux...
La deuxième affirmation : pour vivre heureux, vivons cachés... Elle m'a toujours intrigué... Elle suppose quand même une retraite, un mise en recul, un éloignement du monde... Faut-il cacher son bonheur pour pas qu'on nous le vole ? Le bonheur ne serait-il pas communicatif (à la différence du rire) et susciterait-il la jalousie ?... Qui sait ?... Mieux vaut faire envie que pitié : pas si sûr ! On revient à la première assertion : si tout va bien, au mieux vous suscitez l'indifférence, au pire la jalousie voire le mépris... S'il est heureux, il en a de la chance, ou il se rend pas compte de tout ce qui devrait le rendre triste : il est égoïste, aveugle et sourd, voire très très bête...
Enfin, la fameuse phrase de Voltaire qui conclue 'Candide' : cultivons notre jardin... Je ne me lancerai pas dans un commentaire sur ce roman extraordinaire et toujours d'actualité (la description des malheurs de son temps a un tel écho dans le notre...). Je dirai simplement par boutade que je n'ai pas la main verte pour me lancer dans l'agriculture domestique...
En conclusion, si en ce moment, vous n'avez pas grand-chose à raconter, que vous aimez à vous cacher et que vous êtes dans votre jardin... Vous êtes probablement très heureux...
Post-scriptum salutaire à cette chronique des temps heureux... Vous-êtes vous une fois posé la question : pourquoi on dit "comment ça va" ? Non... C'est mon ancienne voisine Martine qui m'a donné l'explication de cette formule... Comment ça va, c'est comment on a fait caca... Est-ce qu'on est bien allé ? Eh oui... Et c'est pareil dans toutes les langues... Quand on vous demande comment vous allez, c'est avant tout pour savoir ni vous n'avez pas de problèmes digestifs, si vous êtes bien allé à la selle (j'adore cette expression !!!)... Je crois que, désormais, quand on vous dira "comment ça va ?" vous ne regarderez plus votre interlocuteur de la même façon... C'est pas une raison pour l'envoyer chier !!
Allez, à bientôt pour de nouvelles aventures sur mon blog... Au mois de mai... Joli moi de mai...
Et bonjour chez vous.