Et voilà, c'est fait. La France remporte le Tournoi des Six Nations, de façon plutôt fébrile au cours d'un match contre le Pays de Galles qu'on oubliera vite. L'Irlande finit deuxième en battant l'Angleterre en Angleterre... et ça, c'est bon ! Quant à l'Italie, elle perd de trois points (pour une pénalité à deux minutes de la fin du match) contre l'Ecosse à Rome. Etrange Tournoi sans véritable vanqueur. Oui, bien sûr, la France termine première au "goal-average" (marrant d'employer ce terme footballistique au rugby !). Aux points (ancien décompte jusqu'au début des Années 1990), France et Irlande terminent premières ex-aequo. L'Ecosse, qui a battu les deux favoris officiels de ce tournoi (la France et l'Angleterre) termine troisième, l'Angleterre - championne du monde en titre - est quatrième, le Pays de Galles - vainqueur du Grand Chelem l'an dernier - est cinquième et l'Italie termine dernière mais tous les observateurs s'accordent pour dire qu'elle a fait d'énormes progrès... Etrange ce palmarès... Un tournoi de dupes finalement... Pas de gagnant... L'impression que le niveau du rugby européen a bien baissé... Laquelle des équipes de l'Hémisphère Nord tiendrait ne serait-ce qu'une mi-temps contre les All Blacks ou les Wallabies, voire les Springboks ?!... Alors, c'est vrai, cet automne, la France avait brillé, remportant ses quatre tests d'affilée (une première), mais depuis il y a eu ce tournoi avec des matchs hachés sauf le brillant France - Angleterre... On en saura un peu plus en juin... Quoique... Une tournée avec un match en Afrique du Sud (très bien... ça va être chaud) et un autre... en Roumanie... Est-ce le meilleur moyen de préparer la Coupe du Monde qui se rapproche ?... En tout cas, deux joueurs français, deux "anciens", m'ont particulièrement impressionné : Dominici et Castaignède... Heureusement qu'ils étaient là !
Un dernier mot sur le rugby... Montferrand s'est pris plus de quarante points... à Agen... Agen, hasard ou coïncidence, est le lieu où va désormais travailler mon collègue Farid dont on a fêté le départ ces dix derniers jours... Snif ! Dur de voir un copain partir... J'ai eu l'impression (et je l'ai dit à mon ami Gilles d'Ascu) de me retrouver dans la situation de mes collègues de Luri quand je suis parti il y a un an et demi du Cap Corse pour retrouver le Bourbonnais. D'ailleurs, j'ai fait réaliser pour Farid ce que ma collègue Aline avait fait réaliser pour moi (sur une idée de Pierrette pour son propre départ deux ans plus tôt) : un livre d'or par les élèves avec leurs impressions et leurs mots touchants de sincérité avec les fautes d'orthographe et les petits dessins... Il y a un peu plus d'un mois j'avais parcouru mon livre d'or offert lors de mon départ de Luri en 2004. Je ne savais pas alors que Farid allait partir peu après et que je participerais à la réalisation d'un projet semblable... Comme quand on passe le flambeau...
Forcément, un peu de nostalgie... Et, dans la nuit de vendredi à samedi, j'ai encore rêvé non pas que je retournais à Manderley (clin d'oeil au roman "Rebecca") mais à Castellu, mon petit village au fond de la vallée de Luri... Je retrouvais mon appartement avec ses tomettes rouges, ces doubles volets si caractéristiques des maisons corses, l'odeur si particulière du maquis après la pluie, et le soleil à travers les persiennes qui laissent deviner au loin un air de Méditerranée pas si paisible après trois jours de tempête... En plus, vendredi soir, sur Thalassa, il y avait un reportage sur l'Irlande. Avec mes parents, on s'est exclamé : on dirait le Cap !!
Autre nostalgie du vendredi... Je ne sais plus à quelle occasion... Avec mes parents on s'est mis à évoquer Sophie, mon "ex", avec qui j'ai vécu de décembre 1990 à février 1994... A l'époque, elle avait eu un poste à Grasse et avait eu trois jours pour faire sa valise. Le voyage Moulins-Grasse en février 1992 tous les deux avec sa mère en renfort chacun avec trois sacs faits à la va vite fut l'un des plus douloureux moments de ma vie... Nous avons pleuré tout le long du trajet (et il est long !). Nous savions qu'au bout du voyage il y aurait la fin de notre amour. Bien sûr, notre histoire dura encore un peu plus d'un an mais elle s'acheva dans la mesquinerie et le mépris. Si Sophie n'était pas partie, j'aurais peut-être deux ou trois enfants aujourd'hui, puisque nous avions commencé à en parler... Nous aurions peut-être également divorcé puisque statistiquement c'est le lot d'un couple sur trois... Peu importe... Tout cela est bien loin mais il m'arrive forcément d'y repenser... Je crois que j'ai tout oublié depuis bien longtemps et certaines nuits je me réveille après avoir rêvé mon autre vie et je me dis que c'est peut-être l'inverse, que je suis peut-être en train de rêver, que je vais me réveiller et que je vais me retrouver dans les bras de mon épouse pas loin de nos enfants. Ce sont des rêves absurdes mais on ne contrôle pas ses rêves... On peut essayer... Je n'en rêve pas non plus toutes les nuits... C'est de temps en temps, "à l'improviste"... Comme une brise légère, un souffle malicieux...
Vendredi de nostalgie. Samedi matin de déprime avec ma mère qui va pas bien. Elle a toute sa tête, peut tout à fait suivre une conversation et y participer. Mais elle se perd chaque jour un peu plus dans la maison. Elle n'est plus du tout autonome pour la toilette et c'est ce qui m'effraie le plus... On doit s'occuper d'elle comme d'un enfant. C'est ça, la fin de vie ? Retomber en enfance ? La vieillesse et la maladie doivent-elles forcément passer par l'humiliation de ne plus être autonome pour les choses intimes ? Et je suis inquiet pour mon père qui s'épuise moralement et physiquement à assister ma mère et à refuser une aide extérieure (mais quelle aide d'ailleurs ? les aide-malades ont expliqué à mon père qu'ils ne faisaient pas la toilette intime).
Samedi après-midi d'espoir. Avec mon père, nous allons à la manifestation contre le CPE. Nous y retrouvons quelques collègues. D'abord inquiet du nombre de participants, je suis agréablement surpris. Il y a beaucoup de monde. Je ne sais pas ce que ça donnera. Certains parlent d'un appel à la grève générale. Je repense à d'autres conflits. Je ne parlerai pas de 1968 car je n'étais pas né et, en plus, on oublie toujours qu'après mai il y avait eu juin 1968 avec un triomphe de la Droite aux élections. Je me souviens de décembre 1986 auquel j'avais participé... Un million de lycéens et d'étudiants dans la rue. Seuls contre le gouvernement de Chirac on avait fait retirer le projet Devaquet. Et il y avait eu la mort de Malik Oussékine, tué par les brigades volantes (des policiers à moto : l'un conduit et l'autre arrose à coups de matraque). En 1992, la veille de mon écrit de CAPES, j'avais manifesté contre Jospin... 1994, le SMIC jeunes de Balladur, j'étais à l'armée et j'ai suivi ça de loin à la T.V. Décembre 1995, j'étais à Ajaccio, retrait du plan Juppé après des semaines de blocage. Printemps 2000, j'étais à Luri, on fait grève contre Allègre et ses réformes... Allègre saute mais ses réformes sont mises en place. 2003, le printemps du conflit des retraites. Pendant plus d'un mois les enseignants sont en grève, attendant désespérément l'appel à l'extension du conflit et à la grève générale... Je perds quasiment un mois de salaire et je prends mes premiers gaz lacrymos (un copain manquera perdre un oeil) lors des manifs de Bastia... Bref, quelques souvenirs... Une grève générale, pourquoi pas ? Mais faut qu'elle marche. Si elle ne concerne qu'une petite partie de la population, on échouera comme en 2003. Par contre, pour faire de la politique fiction, qui a le plus intérêt à ce que Villepin échoue et perde le bras de fer ? N'est-ce pas encore le bon Nicolas Sarkozy ? On a l'impression que, quoi qu'il arrive, il est là... Trop fort notre Iznogoud !!! Enfin, en écoutant mes élèves et en me fiant à mes propres impressions, il semble que la T.V. ne montre les jeunes que quand il y a des voitures qui crament... En novembre dans les banlieues, aujourd'hui dans le quartier latin... Et les généralisations : "les jeunes savent pas ce qu'ils veulent", "ils sont pas politisés", "ils s'intéressent à rien", "ils sont manipulés", "c'est tous des feignants"... etc... etc... Il n'y a pas "les" jeunes comme il n'y a pas "les" Arabes comme il n'y a pas "les" Corses, etc... etc... Par contre, attention à la fracture générationnelle entre les gouvernants et les moins de quarante ans. Quels que soient les élus de 2007, qu'ils soient de Gauche ou de Droite, qu'ils n'oublient pas que - même si un électeur sur deux a plus de cinquante ans - les forces vives de la Nation ne se recrutent pas chez les retraités. Faudrait pas que nos anciens oublient qui va payer leurs retraites... Si on se retrouve dans des boulots précaires à vie (et je ne parle évidemment pas de moi qui ai la sécurité de l'emploi), il y a un jour où on en aura marre de voir une grande partie de son salaire prélevée pour financer les retraites de personnes qui n'ont pas bien anticipé l'évolution démographique il y a vingt ans...
Voilà. Enfin, dimanche, pour la première fois depuis très longtemps, j'ai ouvert la Bible. Un moment que j'avais plus envie d'entendre l'Esprit me parler parce que je suis trop révolté contre Lui pour l'écouter. Alors, j'ai lu le livre de Job, l'histoire de cet homme très croyant qui perd sa famille, ses biens, sa santé mais pas la vie et qui se met non pas à douter mais à sérieusement se révolter contre ce qui lui arrive. Un petit livre étonnant. J'ai ensuite parcouru "L'Ecclésiaste" : Vanité des Vanités, tout est Vanité... Il n'y a rien de neuf sous le soleil... etc... Puis la lecture des Dix Commendements et d'un extrait de l'Evangile de Jean (les lectures de ce troisième dimanche de Carème) : l'épisode où Jésus, en colère, vire les marchands du Temple... Bref, la Bible version en colère. Je ne sais pas si je suis croyant. Je constate simplement en lisant ces textes combien à travers l'Histoire les hommes se sont interrogés... C'est vrai des Juifs, des Chrétiens, des Musulmans, des Bouddhistes, des religions d'Orient, des philosophes, des athées, etc... C'est finalement cela, l'Humanité, peut-être : s'interroger sur le pourquoi des souffrances qui nous entourent ou nous habitent.
Bonjour chez vous.
Post scriptum : je viens d'apprendre par ma collègue Aline le décès d'Antoine, le sourd-muet de Castellu. Tous les jours ce vieux monsieur, muré dans sa solitude involontaire, allait du hameau de Castellu au hameau de Piazza pour faire quelques courses à l'épicerie chez François (tout un poème cette épicerie !). On se saluait. Une fois, il m'a dit deux mots, ce qui était pour lui un réel exploit, c'était "Bonne Année !". Je n'avais pas pu lui dire au revoir à mon départ de Luri fin août 2004 car il avait été placé en maison de retraite quelques mois auparavant. Car, outre son handicap, il était en train de devenir aveugle et risquait donc d'être renversé par une voiture... Quelle triste fin de vie muré dans le silence et l'obscurité. Paix à son âme.
1 commentaire:
S'agissant du rugby... car j'en suis resté là, je ne crois pas comme toi que la qualité du jeu des nations européennes ait véritablement baissé face à celles du sud. Dans l'ensemble le jeu s'est nivelé et plutôt vers le haut. Et c'est quelque chose que l'on doit au professionnalisme et à l'internationalisation : comment expliquer autrement la progression de l'équipe d'Italie dont un quart de l'effectif évolue dans le championnat français. L'équipe de France elle-même profite de ces échanges et ce ne sont pas Ibanez, Castaignède ou Magne, très performants, qui le démentiront... Stephen Jones en est un autre exemple bien connu chez nous ! Le jeu français s'est aussi très rehaussé en matière de rigueur et il suffit pour s'en convaincre de voir le peu de pénalités concédées à l'adversaire : on est loin du jeu flamboyant mais indiscipliné des années 70-80 ou bien des matches ont été perdus sur des points de pénalités...
Donc je crois que le jeu du nord a gagné en homogenéité (comment expliquer ce tournoi sinon) ce qu'il a perdu en (relatives) singularités nationales. Maintenant, que dire de l'efficacité face aux nations du sud ??? Elles bénéficient on le sait bien de championnats nationaux et internationnaux (super twelve - tri nations) plus courts dans un espace plus resserré ce qui est à leur avantage...
Après, qui vivra verra !
Fred. aspirant B.Laporte ;o)
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