Mercredi 5 décembre 2018, au matin, cela fera dix ans que ma mère est partie, emportée par les suites de la maladie d'Alzheimer à 64 ans, en décembre 2008.
J'étais au collège de Tronget où j'exerçais alors, quand le principal m'a appelé pour me dire que mon père m'attendait au bout du fil pour m'annoncer "la" nouvelle. Ma mère avait été "placée" en juillet 2008 en maison de retraite. En quelques mois, elle avait perdu plus de trente kilos, ne nous reconnaissant plus du tout, ne s'alimentant plus (et les autorités médicales interdisant à mon père et à moi-même de l'alimenter... ils avaient besoin du lit...) et hurlant toute la journée car, comme elle était déshydratée en permanence, elle vivait un perpétuel cauchemar. Ses derniers mois furent un enfer.
Je savais que ma mère allait partir ce matin là. La veille au soir, après avoir dîné avec mon père, je suis passé à l'hôpital / maison de retraite / mouroir. Ma mère était au plus mal. J'ai vu, pour la première fois en six mois, son médecin qui a dit qu'il fallait "prévenir la famille qui était loin" (en l'occurrence ma soeur). Tout était dit. Pour une fois avec tact. Je suis resté seul avec ma mère. Je lui ai dit qu'elle pouvait partir. Je suis persuadé qu'elle m'a compris, car elle a serré fort ma main à ce moment là et elle a hoché la tête. En sortant de l'hôpital / maison de retraite / mouroir, j'ai appelé ma copine au téléphone et lui ai dit que c'était fini. Ma copine m'a dit que j'exagérais, qu'il y avait peut-être encore un espoir. Ma mère s'est éteinte entre 6h et 8h, aux dires des infirmières-aides-soignantes.
En arrivant vers 9h30 à l'hôpital / maison de retraite / mouroir, après être passé chercher mon père qui était évidemment effondré et incapable de faire quoi que ce soit, nous avons à peine pu nous recueillir sur la dépouille de ma mère, qu'a débarqué la "psychologue des aidants" que je n'avais croisée qu'une fois auparavant. Elle nous a (surtout sur moi) littéralement sauté dessus, nous sortant les banalités absurdes médicales d'usage chez les psys qui, décidément, n'ont aucune psychologie ni aucun tact : "Vous avez le droit d'être en colère". Elle a dit ça parce que elle avait peur que "je pète un plomb". En effet, six mois auparavant, alors même que ma mère était placée en mouroir en juillet 2018, moi, j'avais fait un séjour (en hospitalisation libre, je précise, mais pour ça, je continue à payer une surprime d'assurance pour le prêt de mon appartement...) en hôpital psychiatrique. Au sortir de l'hôpital, j'avais accordé une interview à "La Montagne" (à leur demande), interview titrée (par le journal et sans me prévenir) "J'ai fini par péter les plombs", où j'expliquais le quotidien d'un aidant et surtout la façon dont (à l'époque) on traitait les "vrais" malades atteints d'Alzheimer (et pas de "simple" démence sénile comme la confusion est souvent faite par un corps médical qui n'est pas formé à cette maladie étrange et terrible quand elle touche des personnes jeunes). En plus, j'avais témoigné dans plusieurs mails, dont un publié dans le journal de mon syndicat (le SNES), où je dénonçais les conditions honteuses de la santé en France... Bref, elle avait peur que je m'énerve.
Je n'étais pas venu pour m'énerver. J'étais venu pour me recueillir sur la dépouille de ma mère. Son corps était à peine tiède et il fallait que je supporte les niaiseries de la psy de service. Heureusement, elle a fini par partir. Le reste de la journée, j'ai tenu compagnie à mon père. On est notamment passés voir mon médecin traitant. Le lendemain, ma soeur est arrivée d'Allemagne. Le dimanche soir, nous avons dîné tous trois avec le curé qui allait célébrer les obsèques de ma mère.
Obsèques en deux temps. Messe le mardi suivant à Moulins. Enterrement à L'Escarène (Alpes Maritimes), le village natal de mon père (quasi natal puisqu'il est né à Nice), le jeudi suivant. Avec traversée de la France sous la neige et la pluie à l'aller et surtout au retour (ah ! Saint-Etienne sous la neige !).
Tout ça est bien loin. Dix ans déjà.
Mercredi 5 décembre 2018, pour les dix ans du rappel au Ciel de ma mère, la messe de 9h des malades à Saint-Pierre de Montluçon (bien connue des paroissiennes et des paroissiens de la Paroisse Sainte-Marie) sera dédiée à la mémoire de ma mère, Anne-Marie Pérès.
Si vous voulez en savoir un peu plus sur la vie de ma mère qui, avant d'être malade, fut la fille de ses parents, la femme de mon père, ma mère et celle de ma soeur, et également une excellente professeur de lettres classiques (malgré une hiérarchie parfois honteusement punitive) et une catholique pratiquante, fervante et respectueuse des convictions d'autrui (elle ne m'a jamais forcé à aller à la messe, c'est peut-être pour ça que j'y vais si naturellement...), j'avais écrit un court portrait de ma mère en décembre 2008 :
Merci d'avoir une pensée pour ma maman mercredi 5 décembre, et si vous êtes croyants, merci de faire une prière pour elle. Merci pour elle. Merci pour moi aussi. L'accompagnement spirituel aide à vivre, au delà de simplement survivre.
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