jeudi 20 octobre 2005

Identité et généralités

Suite à mon message sur ma nostalgie de la Corse, j'ai reçu la réaction d'une amie Corse... J'avais mis cette réaction en commentaire simple mais je la mets aujourd'hui en article avec, à la suite, ma réponse à cette amie qui pose de vraies questions dans son mail... A suivre.

"Cher Jean-François,c'est une réaction plus que tardive à un mail précédent.Celui où tu évoquais ton "mal de Corse"... J'ai trouvé ce texte très touchant mais il y a 2 ou 3 petites choses qui m'ont chagrinée.C'est quand tu dis que les Corses t'ont toujours considéré comme un pinzutu. Non ! Pas cette expression de ta part !
Pour ma part ,je suis Corse, c'est ainsi , ,j'ai pas fait exprès ,ni fière ni honteuse,mais je peux donc répondre en tant que Corse :Pinzutu,pour moi ,ce genre de remarque n'a pas cours.Je t'ai toujours vu comme un collègue ,puis un copain , qui n'a pas eu la même enfance que moi.Qui a donc une expérience différente.Le reste ? ce à quoi tu fais allusion , ,je m'en tape ! C'est toi qui y penses ,pas moi. Ca ,c'est le premier point.
Le second, c'est de te voir utiliser l'expression "les Corses".Comme si tu étais à présent passé derrière une barrière invisible.Les Corses =les autres.Et pourquoi pas les Arabes ou les Américains ?
Je ne te pensais pas capable de généralisation .Il y a autant d' individus que d'habitants ,et personnellement,je ne suis pas "les Corses".Je n'aime pas le fait d'être réduite à un groupe .C'est comme quand j'entends parler "des profs", et pas de certains profs.Comme tu vois ,je suis porteuse d'une double tare.(Triple, en fait, si tu considères que je suis "les femmes"-autre expression qui me fait bondir-).
Bon,tu trouves peut-être ma réaction un peu excessive ;alors pour me justifier ,j'invoquerai une raison bien commode : si tu me trouves susceptible ,n'oublie pas que c'est normal puisque ... je suis...Corse ?...
Très affectueusement , Isabelle."

Ma réponse :
"Tu sais, sur le continent, longtemps, on m'a appelé le corse, mais
aussi parfois, le Juif, le Portugais... Quand j'écris "Les Corses", je me sens faire partie du lot mais, pour certains, je n'en fais pas
partie. Des collègues, dont certains avec qui j'avais d'excellents
rapports, m'ont toujours dit que j'étais un "pinzutu" (ironie de
l'histoire, les cousins des Pérès de Peri s'appellent Pinzuti,
notamment le directeur des archives d'Ajoaccio... Pinzuti, en
l'occurence, est un vieux nom de famille de la région d'Ajaccio...). Au début, ça me vexait ; ensuite, je faisais avec. Quand je dis "les
Corses", je dis aussi "les Auvergnats"... Par contre, je dis pas "les Noirs", car ce n'est pas une identité contrairement aux allusions de Dieudonné, ni "les homos" car ce n'est pas une communauté (contrairement à ce que voudraient nous faire croire certains médias).

Tu as entièrement raison, tu n'es pas responsable de ton lieu de
naissance. Malheureusement, ce monde pense le contraire. En tout cas, je suis vraiment désolé si je t'ai froissée. Et, rassure-toi, je suis encore plus susceptible que toi, et j'utilise régulièrement le prologue d'"Astérix en Corse" pour me justifier... C'est d'ailleurs de ce texte que je m'étais inspiré pour écrire mon petit texte sur ma nostalgie de la Corse...

Je n'ai jamais voulu te réduire à un groupe. Tu es unique !!!
Néanmoins, je constate que les amitiés que j'ai eues en Corse, en tout cas jusqu'à maintenant, sont riches et fortes, plus qu'ailleurs. Ce n'est pas dû au fait que les gens "soient" Corses (ce qui, j'en suis bien d'accord avec toi, ne veut rien dire en soit) mais que, pourquoi je ne sais, dans cette île, le mot amitié semble avoir un sens plus affirmé et être encore une valeur absolue et non relative. Mais j'ai aussi des amis ailleurs.

Enfin, je pense que les souvenirs d'enfance, quoi qu'on dise, influent sur notre façon de voir les choses, le fait d'avoir vécu à la campagne, en ville, à la montagne, etc... En même temps, quand on a dit ça, on n'a rien dit.

J'espère que le malentendu est (largement) dissipé ?

De toute façon, et ça, on me l'a souvent rappelé, je ne suis de nulle part, né dans la Banlieue Parisienne, vivant en bourbonnais, étudiant à Clermont, avec un nom à consonnance ibérique voire juive alors qu'il est attesté Corse depuis au moins huit siècles En plus, je suis un Catho de Gauche qui ait voté pour Chirac en 2002, un encarté du SNES (syndicat classé rouge) qui a voté "oui" au référendum et dont la soeur est marié à un Allemand dont la mère vivait dans une région "occupée" depuis soixante ans par la Pologne (la Silésie). Bref, c'est le bordel ! l'avantage, c'est que c'est plus difficile d'être nationaliste avec de telles tares...

Bises.

J.-François"

2 commentaires:

Anonyme a dit…
Ce commentaire a été supprimé par un administrateur du blog.
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